Tir d’essai d’un missile balistique : un « signal stratégique » envoyé par la France

La France a procédé à un tir d'essai de missile balistique M51, principal vecteur de la dissuasion nucléaire. Une réussite qui envoie un message aux pays alliés et compétiteurs. 

Par Clément Machecourt

La France a mené, samedi 18 novembre, un tir d'essai d'un missile balistique M51.3 au centre d'essai de la DGA à Biscarrosse (ici le 30 septembre 2022). 
La France a mené, samedi 18 novembre, un tir d'essai d'un missile balistique M51.3 au centre d'essai de la DGA à Biscarrosse (ici le 30 septembre 2022).  © THIBAUD MORITZ / AFP

Temps de lecture : 3 min

Un point lumineux suivi d'une traînée blanche qui s'élève dans la nuit noire, sous l'œil de la lune et des habitants des Landes. Samedi 18 novembre dans la soirée, la Direction générale de l'Armement (DGA) a effectué un tir d'essai réussi d'un missile balistique M51 depuis son centre d'essai de Biscarrosse.
Ce dernier doit permettre de délivrer le feu nucléaire si la France était victime d'une attaque atomique. 

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Ici, le missile n'avait pas de charge nucléaire. Il a continué sa course avant de s'abîmer dans l'Atlantique nord, « à plusieurs centaines de kilomètres de toute côte », explique le ministère des Armées. Le temps pour la DGA de récolter de nombreuses données sur le vol, mais aussi d'envoyer un message aux pays alliés et compétiteurs sur l'état de la dissuasion nucléaire française.

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Dissuasion nucléaire française

« Premier tir d'essai réussi du missile balistique stratégique M51.3 », s'est réjoui sur X (ex-Twitter) le ministre des Armées, Sébastien Lecornu. La gamme des M51 équipe depuis 2010 les quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE), capables de délivrer depuis les océans le feu nucléaire si les intérêts vitaux de la France sont frappés. La dissuasion nucléaire française est ininterrompue depuis 1972, et la première sortie en mer du sous-marin Le Redoutable

Chaque missile est une mini-fusée transportant une dizaine de têtes nucléaires à 25 000 km/h. À titre d'exemple, le SNLE Le Terrible possède 16 missiles M51. Cette troisième version, expliquait en 2014 Alain Charmeau, alors président d'Astrium SAS / Airbus Défense et Espace, doit permettre « de traiter les obsolescences et, d'autre part, de répondre à l'échéance des dix prochaines années aux évolutions des besoins opérationnels : adaptation du système aux nouvelles charges utiles, précision et souplesse d'emploi en portée et pénétration. »

« Ce test montre la réussite de plusieurs acteurs et de toute une filière française, d'Ariane Group pour la propulsion à la DGA, en passant par Naval Group pour les sous-marins », souligne Héloïse Fayet, chercheuse à l'Ifri et spécialiste de la prolifération et de la dissuasion nucléaire. À la différence du Royaume-Uni qui utilise des missiles américains Trident, la France a une filière industrielle complète autour du M51, avec plus de 450 industriels français, dont 25 % d'entre eux sont des PME ou TPE. Le M51.3 doit être livré en 2025. 

« Signalement stratégique »

Outre les précieuses données récoltées, ce test montre « la crédibilité technique de la France ». « Dans le contexte actuel, notre pays n'hésite plus à mener une politique de "signalement stratégique" à ses alliés et aux pays compétiteurs », pointe la chercheuse de l'Ifri, co-autrice d'une note sur le sujet. 

Cet essai, annoncé en amont aux pays détenteurs de l'armée atomique, est scruté par ses derniers, qui voient ainsi l'état de la dissuasion nucléaire française. C'est toute une « grammaire sophistiquée » qui est utilisée par les différents pays pour montrer leur capacité. « La France profite des exercices Poker, où les forces aériennes stratégiques doivent simuler un raid dans la profondeur et le tir d'un missile nucléaire ASMP-A, pour renforcer sa crédibilité. Des étrangers sont en plus invités, à la différence des tirs d'essais balistiques », ajoute Héloïse Fayet.

D'autres signaux stratégiques sont utilisés, comme les discours du président de la République, ou peu après l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022, quand la presse avait appris que trois SNLE étaient en patrouille, contre deux en temps normal. 

Avec la Loi de programmation militaire (LPM) votée par l'Assemblée nationale en août dernier, la dissuasion nucléaire reste la clé de voûte de la stratégie française pour assurer la sécurité de son territoire. Sur les 413,3 milliards d'euros de budget consacrés aux armées entre 2024 et 2030, 54 milliards (soit 13 %) le sont pour la modernisation et l'entretien des armes nucléaires et de leurs moyens de transport, qu'ils soient sous-marins, navals ou aéroportés. 

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Commentaires (14)

  • feisongn

    Kermit12, il s'agit du premier essai du M51. 3, les M51 et M51. 2 ont du être testés eux aussi

  • Kermit12

    A lire l'article il semble que le M51 n'ait jusque là jamais été testé.

    Est-ce possible, et si tel était le cas ne serait-ce pas totalement irresponsable ?

    Qu'un spécialiste de la chose veuille bien nous rassurer !

  • navrre

    Cette affaire de faux OVNI a été du pain béni pour notre dissuasion. Elle a permis d'envoyer, à frais nuls et sans la moindre déclaration officielle, un signal fort sur l'évolution de notre armement nucléaire. Bien joué !