Une patiente française recouvre la voix grâce à une greffe de larynx

L’opération, une première en France, s’est déroulée début septembre dans le service ORL et chirurgie cervico-faciale de l’hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon.

Par V.D. avec AFP

Une femme vient de bénéficier de la première greffe de larynx en France. Une prouesse médicale réalisée à Lyon. (Photo d'illustration)
Une femme vient de bénéficier de la première greffe de larynx en France. Une prouesse médicale réalisée à Lyon. (Photo d'illustration) © Franck KOBI / MAXPPP / PHOTOPQR/DNA/MAXPPP

Temps de lecture : 3 min

«  Cela me fait bizarre de parler à nouveau. » Une femme vient de bénéficier de la première greffe de larynx en France, une intervention présentée, lundi 20 novembre, à Lyon (Rhône) par l'équipe médicale qui espère pouvoir répéter cette « prouesse » prochainement. Identifiée sous son seul prénom, Karine, la patiente, âgée de 49 ans respirait par trachéotomie depuis une vingtaine d'années, sans pouvoir parler, à cause de complications liées à une intubation après un arrêt cardiaque en 1996.

Quelques jours après la greffe, réalisée les 2 et 3 septembre à Lyon, elle a pu prononcer quelques mots d'une voix encore très faible. Elle suit, depuis, des séances de rééducation des cordes vocales, de la déglutition et de la respiration avec une orthophoniste pour recouvrer toutes ses capacités.

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Son traitement immunosuppresseur a été renforcé à la suite d'un début de rejet mais elle a pu rentrer chez elle, dans le sud de la France, le 26 octobre. Elle n'a donc pas participé lundi à la présentation de l'intervention, mais a expliqué par écrit s'être portée volontaire, il y a dix ans, « pour retrouver une vie normale ». « Mes filles ne m'avaient jamais entendue parler », confie-t-elle en assurant être armée de « courage » et de « patience » pour faire face aux douleurs et au travail de réapprentissage.

Le professeur Philippe Céruse, chef du service ORL et chirurgie cervico-faciale de l'hôpital de la Croix-Rousse, a lui aussi fait preuve de détermination avant de coordonner cette greffe inédite en France.

Un organe complexe

L'idée de cette intervention a germé lors de la première greffe mondiale de larynx, réalisée en 1998 à Cleveland, aux États-Unis, sur un homme qui avait perdu ses cordes vocales dans un accident de moto. Le chirurgien se renseigne mais en reste là, jusqu'en 2010 quand il rencontre un confrère colombien qui a reproduit cette intervention très délicate sans jamais rien publier. Le Dr Luis Fernando Tintinago Londono l'invite une semaine à Cali pour lui montrer comment prélever un larynx.

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C'est « l'un des aspects les plus complexes » car cet organe « est innervé par de tout petits nerfs et vascularisé par de toutes petites artères et veines qui s'entrecroisent », explique le professeur Céruse. Pendant la décennie suivante, il s'entraîne avec une équipe d'experts sur des cochons ou des cadavres, obtient les autorisations, commence à chercher des patients éligibles. En 2019, « Karine » est identifiée. Mais le Covid interrompt tout.

Vingt-sept heures d'opération

Entre-temps, deux greffes du larynx sont recensées par la littérature médicale, une en Californie en 2010 et une en Pologne en 2015. C'est peu car ces opérations ne sont pas prioritaires : un larynx dysfonctionnel est très handicapant mais ne met pas en danger la vie des patients.

En 2022, l'équipe française se remet au travail. Reste à trouver une donneuse, ce qui pour un larynx impose « des caractéristiques anatomiques parfaitement compatibles avec la receveuse, en termes de sexe, poids, taille, groupe sanguin… ». Cela se produit le 1er septembre.

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Après l'accord de la famille, l'intervention peut commencer. Elle durera vingt-sept heures en cumulé. Douze chirurgiens et une cinquantaine de personnels du CHU de Lyon participent à cette première sous la coordination du Pr Céruse et de son confrère Lionel Badet, chef du service d'urologie et de chirurgie de la transplantation de l'hôpital Édouard-Herriot.

L'équipe, « fière » de cette « prouesse », reste tout de même prudente. « C'est la patiente qui dira si c'est un succès », relève le Pr Céruse, en notant qu'il faudra douze à dix-huit mois pour qu'elle retrouve la motricité de son larynx « le temps de la repousse nerveuse ». Il attendra donc qu'elle « se porte parfaitement bien » avant de se lancer dans les deux autres greffes du larynx, pour lesquelles il dispose d'un budget.

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Commentaires (2)

  • ph78

    Cet exploit me laisse sans voix.

  • ultracrépidarien

    Mais c’est quoi cette tenue à gauche sur la photo, les nouvelles blouses de panseuses ?